Ethique des Organisations
samedi 21 décembre 2024 03:46:24L’intégration de règles éthiques soulève des interrogations sur la forme d’intégration, les conséquences juridiques et les risques anticipés, ainsi que sur l’efficacité des dispositifs d’alerte éthique et la responsabilité juridique des organisations.
Responsable de la thématique: Delphine Pollet-Panoussis, Pr. de droit public
Au sens commun, l’éthique est une science de la morale et des mœurs. Elle se détermine de manière relative dans le temps et dans l’espace en fonction de la communauté humaine à laquelle elle s’intéresse. Les règles éthiques s’appliquent donc à des activités ou actions clairement identifiées ou à des groupes d’individus liés par une finalité commune. L’éthique a donc clairement vocation à s’appliquer dans la sphère professionnelle. Elle invite alors le professionnel à adopter un code moral, à réfléchir aux valeurs qui motivent son action et à choisir, sur cette base, la conduite qui lui semble la plus appropriée. En ce sens l’éthique se rapproche de la déontologie mais sans se confondre avec elle car il n’est pas nécessaire pour se conformer aux règles déontologiques de réfléchir aux valeurs qui les sous-tendent, ni même de partager ces valeurs.
Les exigences éthiques sont aujourd’hui pleinement intégrées au fonctionnement des organisations, aussi bien les entreprises privées (éthique des affaires), que les administrations publiques (éthique publique). Ainsi, si les questionnements éthiques occupent une place importante chez les dirigeants d’entreprise depuis une dizaine d’années, l’adoption de la loi PACTE le 22 mai 2019 impose désormais à toutes les entreprises de mettre en place une politique RSE « en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de leur activité ». Cette démarche RSE (incluant la conformité RGPD) qui vise à répondre aux enjeux du développement durable, sur le plan social, environnemental et économique doit innerver les relations de l’entreprise avec ses salariés, ses clients et ses fournisseurs. En outre, si l’éthique doit, depuis toujours, guider le comportement des fonctionnaires et agents publics conformément aux devoirs qui sont les leurs issus du statut général de la fonction publique, la démarche éthique dans les administrations publiques a cependant pris une nouvelle ampleur à partir de 2016 (loi du 20 avril relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires ; loi du 9 décembre dite loi Sapin 2). L’éthique publique doit ainsi permettre aux agents publics de prendre les meilleures décisions dans l’intérêt commun et elle doit aider les citoyens à évaluer les décisions prises en leur nom. La mise en place de dispositifs d’alerte éthique au sein des organisations (publiques ou privées) depuis 2016 témoigne de la place nouvelle accordée au respect des considérations éthiques.
L’intégration de règles éthiques au sein des organisations suscite un certain nombre d’interrogations directement en lien avec le projet scientifique du C3RD et auxquelles les chercheurs membres de la thématique entendent apporter des réponses dans le cadre d’une approche transdisciplinaire : quelle forme donner à cette intégration (Droit souple -Charte éthique…- ou droit dur) ? Quelles conséquences en découlent pour la sécurité juridique ? Les démarches éthiques mises en œuvre au sein des organisations visent à anticiper la réalisation de certains risques. Lesquels ? Quelle forme donner à cette action préventive ? Quelle place occupe les dispositifs d’alerte éthique dans ce cadre ? Cette démarche préventive est-elle efficace ? Quelles conséquences juridiques pour les organisations en cas de réalisation des risques ? Le régime actuel de responsabilité juridique constitue-t-il une réponse adaptée ?